sorel eros

Pour être tout à fait franc, je suis un peu emmerdé, là. Par curiosité, j'ai acheté et lu Sorel éros presque compulsivement et juste parce que c'est un palindrome géant. L'exercice de style est magnifiquement relevé et c'est de là haute volée, mais je me demande quand même pourquoi.

Non, parce que, c'est un sacré fait d'armes, quand même, un palindrome de dix milles caractères. Ca demande un travail colossal et fastidieux, et on pourrait même se dire que Jacques Perry-Salkow, qui connait bien les anagrammes et ces jeux de lettres, et Frédéric Schmitter, qui connait bien l'Oulipo et les jeux de langue, s'avèrent être deux petites fourmis dans leur immense boulot accompli, mais le pourquoi reste quand même un peu tenace, même si la question s'adresse plus à l'éditeur qu'à eux. Mais je m'explique.

Georges Perec, en son temps, en avait pondu un de cinq milles caractères (en gros, j'arrondis un peu tous les chiffres, je le concède). Même si Perry-Salkow et Schmitter ont dézingué le record établi par leur modèle et rendu un texte qui avance cahin-caha. Certaines phrases font monches et inspirent le respect pour les auteurs qui, sans le choix des lettres ou à moitié seulement, arrivent à mettre des baffes. Quant aux autres chapitres ou paragraphes, ils n'évitent pas les accrocs de la règle imposée, et la lecture s'en ressent. C'est assez dommage, finalement, un patchwork qui laisse à demi-pantois malgré l'incommensurable réussite de leur entreprise.

La réussite est belle et l'édition se devait de l'honorer, mais peut-être Rivages s'emballe-t-il (ou s'emballent-ils ?) sur le produit final. Le prix s'en ressent, et on en arrive à se faire la réflexion: tout ça pour ça.
Il fallait honorer cet exercice réussi en le publiant, mais bon. Autant qu'il fallait aller au bout du projet, mais bon. Peut-être n'était-ce pas si utile, finalement. Malgré le respect que l'on doit aux auteurs.