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La Confrérie des Libraires Extraordinaires
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22 avril 2020

Bosch sans Bosch

lame

 

Vous ne connaissez pas encore Esther Rochon, je suis sûr, et c'est pas aberrant. Je n'en avais jamais entendu parler avant, et pourtant, elle livre un sacré tableau à la fantasy et aux lecteurs. Et même plus: pas seulement aux lecteurs de fantasy. Il suffit juste d'être un peu curieux.

Lame n'est pas seulement de la fantasy mais appartient plus généralement à la littérature de l'imaginaire, et si on détaille encore plus le paysage qu'elle nous envoie, Esther, on trouve même un paquet de connexions et de références à ce qu'on trouve plus généralement ailleurs.
C'est l'enfer qu'elle nous décrit et dans lequel elle nous envoie en spectateur, et même si les références à la Bible ou à la Divine Comédie (entre autres) sont fréquentes dans la littérature de l'imaginaire, on retient plus ces textes pour une portée et des inspirations toutes autres. On notera certes quelques longueurs dans la description de l'enfer, lieu au sol boueux et vaseux dans lequel on s'enfonce jusqu'à devenir trop mou pour bouger, tendant les bras vers tout ce qui se mange autour de nous et cherchant le moindre plaisir charnel au milieu de rien, jusqu'à ne plus être rien, mais l'intrigue qui arrive tient carrément la route.

C'est cette vision d'artiste qui confère au texte toute la force qu'il nous jette au visage. Plus encore qu'une esthétique ou qu'un tableau que Jerome Bosch aurait volontairement voulu neutre et vide, c'est ce qu'il advient des personnages qui y végètent, leurs questions (ou pas) sur la nature de leur admission en enfer et leur vie dedans qui densifient encore le texte et la lecture qu'on en fait.
Il y a une intrigue qui finit par éclater, évidemment, et même si elle finit par prendre tout son sens au fil des chapitres, son démarrage tardif au sein du récit et en son sein à elle coince un peu parfois. Le principe affirmé de l'enfer tel qu'il est décrit sur les premiers chapitres rend toute intrigue inutile et remet en question toute la puissance du décor et de l'idée construite jusque là, arrive comme une lueur d'espoir là où il ne doit pas y en avoir. Bien sûr, elle enrichit le tableau et les personnages, mais la transition entre les longueurs de la descrption initiale et le lancement de l'intrigue jure un peu. C'est une fois qu'on a passé les longueurs entre la fin de l'un et le début de l'autre qu'on retrouve le plaisir d'explorer la vision hallucinée et fantasmagorique qu'Esther Rochon a livré sur papier.

Il est très riche, l'univers que Rochon nous offre, mais c'est parfois la construction de son récit qui pêche. Il y a quelques chapitres, hélas entier, sur lesquels il nous faut passer pour profiter de la lecture comme elle le mérite. Pafce que malgré ce défaut qu'on ne peut passer sous silence, le texte et la vision qui en découle est un sacré truc à lire, une sacrée fresque esthétique et picturale qui aurait nettement sa place sur une plateforme de séries. Mais si, vous la connaissez: celle à laquelle on s'est tous abonnés pour le confinement. Lame, c'est une super série avec un épisode un peu chiant sur la saison, mais ca reste une super série. Mais sur du papier.

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