Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
La Confrérie des Libraires Extraordinaires
Newsletter
Archives
Derniers commentaires
8 août 2015

La crique sombre

dimmuvik

Pour replacer Notabilia (non pas que nécéssité soit capitale, là, tout de suite, mais le souligner peut-être pertinent), il faut remonter l'arbre généalogique et tomber sur son ancêtre renommé. Eux, ce sont les Allusifs version 1.0, mère du Jour des corneilles de Jean-Francois Beauchemin ou de L'origine du monde, de Jorge Edwards, lesquels m'ont déjà servi à vous boursoufler le cortex il y a quelques temps. Mais pas boursoufler pour rien.

Ici, on est plus vraiment paumé dans une forêt québecoise ou assis en terrasse vers le musée des Arts et Métiers de Paris. On s'est assis à Dimmuvik, ou Grimmuvik, une petite crique islandaise comme il doit en avoir des centaines. A vrai dire, celle-ci n'a pas de nom et à juste été baptisée Dimmuvik (la crique sombre en français) par la famille d'exploitants agricoles qui habitent là.
C'est silencieux, Dimmuvik. Plus de bestioles à élever, de la caillasse à parte de vue qui interdit toute culture, une mer pas très poissonneuse et un immense champ de lave noire. Il n'y a pas de couleurs, la palette de noire et de gris est complète, et très vite, une fausse couche malheureuse apporte la touche finale à l'ambiance. On commence là-dessus.

Le récit est noir de bout en bout, mais jamais gratuitement. Le rythme est lent, carrément lancinant, et la trame trop froide pour autoriser la moindre fantaisie, octroyant au texte un certain cachet.
La plume est aussi noire et rocailleuse que le décor, les personnages décharnés jusqu'en eux même jusqu'à ce que ce qu'ils gardent en eux ressurgissent brutalement sur leurs vies à tous et les maintiennent implacablement dans une vie rachitique et étriquée. La narratrice grandit dans ce cadre familial, où tous on à la fois l'échine courbée, où tous ont ployé sous eux-mêmes et à la fois gardé en eux le courage silencieux d'assurer la survie quotidienne et exhortent le courage qu'il essaient d'entretenir à les faire avancer cahin caha.
La famille de taiseux qu'ils forment obéit à un schéma complexe et drastique. Aucun ne se parle, tous suent pour faire survivre la famille sans connaître particulièrement les éléments qui la composent. Ce n'est pas la famille en question qui est à la fois une et multiple et qui jouirait d'une richesse culturelle incroyable mais tous qui sont parallèles et maintiennent une unité selon l'accord tacite du sang, s'accordant à chacun une richesse humaine improbable dont aucun ne saura quoi en faire après.

L'ambiance et tous les facteurs déployés pour la nourrir convainquent forcément, mais sont un peu trop seuls. Certes, le texte n'éxcède pas les quatre-vingt dix pages et n'a pas la prétention d'évoluer vers le roman plus dense qu'il aurait pu être, mais on regrette le silence autour de l'évolution d'un personnage. Ils ne se parlent pas, et cacher une richesse romanesque par ce silence apparait comme une solution de facilité, seule ombre à relever sur les Enfants de Dimmuvik. Une ouverture pour démarrer après le postulat de base. Le texte, aussi fort soit-il, se limite à ça: le postulat de base d'une fresque potentielle.
Certes, c'est court et n'ambitionne pas d'aller plus loin, mais c'est dommage. Même si l'ambiance est parfaitement rendue et huilée, on finit par vite faire le tour du texte, qui s'avère une belle découverte, sans être l'indispensable absolu.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité