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La Confrérie des Libraires Extraordinaires
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5 septembre 2013

Petit billet vert

saucierQuand j'étais au collège, je me souviens que les pages centrales des cahiers de correspondances qu'on nous filait en début d'année était occupées par des petits billets verts prédécoupés qui représentaient les billets de retard du bahut. Alors à chaque retar, on en remplissait un, on montrait au principal qui l'arrachait et se le gardait en nous disant de filer en cours. Alors je vous en file un, parce que ca ait une bonne semaine que je glande, et je me colle au turbin.

Je me ramène avec, ce coup ci et parce qu'il en fallait bien un, un truc post-apocalyptique. Mais pour une fois, je ne vais pas me la ramener en rabâchant que le post-exotisme de Volodine et consorts, ca déchire (même si ca déchire), mais attirer votre attention sur un autre détail. Ce coup-ci, point de catastrophe fantasmées, uchronique ou en tout cas créée de toutes pièces pour les besoins dramatiques du roman, mais une qui a vraiment existé et traumatisé à l'époque.
Et figurez vous que c'est au Québec que ca se passe. Au tout début du XXe, tout le centre ville de Trois-Rivières est devenu volatil sous l'effet des flammes et a marqué pas mal de monde en même temps.

Mais ici, point de début du siècle, on est bien maintenant, et tout au fond des bois, là ou vivent trois sémillants vieux parfaitement à l'aise avec la vie au fond des bois, la solitude et leur choix de vie qu'ils suivent depuis un paquet de temps. On commence par une photographe qui vient leur rendre visite dans le cadre d'un travail qu'elle réalise sur les survivants des Incendies, même si longtemps après, et on suit, regard extérieur après regard extérieur, ces trois petits vieux qui n'existent plus que par eux mêmes. Et encore, quand je vous parle de regard extérieur, il me serait plus honnête de vous parler de personnages périphériques plus que de vrais  intervenants extérieurs parachutés depuis la métropole lointaine.
Les trois petits vieux (qui semblent quand même vachement plus crédibles et forts que trois petits vieux classiques) y sont dépeints comme ils seraient si on les voyait vraiment. On les devine très denses et taiseux, capables de meubler un silence en excitant notre curiosité par un mutisme contrôlé. On s'imagine à leur table à essayer de leur tirer une conversation et à n'obtenir que quelques banalités qui cachent une vie très seule mais très riche. On s'imagine leur parcours, le raisonnement qui les a poussés à choisir une autre vie et précisément celle là, et ce qui peut la bouleverser bien qu'elle se soit vachement huilée au fil des années.
Et le plus costaud, là dedans, c'est précisément cette plume qui en dit sans trop en dire, mais qui lâche habilement les infos qu compte goutte comme le font les silences des personnages qu'elle décrit qui donne au texte la résonnance qu'il mérite.


Même si je suis un peu à la bourre, les amis, je ne viens pas avec de la daube, quand même. Mais Il pleuvait des oiseaux s'incrit dans ce genre de texte dans lesquels les choix littéraires de l'auteur sont visibles et tellement raccord que malgré les ficelles visibles, l'atmosphère prend quand même vachement, et un peu comme certains films, on rentre chez soi l'esprit encore embrumé par l'ambiance générale au point de se prendre une colonne Morris parce qu'on est dans les nuages.
Quant au sensationnalisme qu'on peut reprocher au post-exotisme, même s'il ressort parfois, on reste malgré tout plus sur le goût de l'élément majeur tu qui prend des teintes d'avant-guerre, et presque de Belle-Epoque plus que sur la grisaille permanente après une guerre cataclysmique incroyable.
C'est vrai qu'on repère les procédés littéraires, quand on a un peu l'oeil, mais bon... Pour une fois, on peut aussi s'arrêter au charme du texte, quand même...

 

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