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La Confrérie des Libraires Extraordinaires
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20 août 2013

La première découverte

monde_sans_oiseauxQuand je vous parlais, il y a quelques jours, de seconds couteaux, la formule n'avait bien évidemment rien de péjoratif. Et quand je vous parlais de découvertes à faire en permanence, Karin Serres peut en être une.
Même si bon... Karin Serres ne sort pas de nulle part, avec beaucoup de théâtre chez l'Ecole des Loisirs ou Espaces 34 mais jusqu'ici pas encore de roman. Et autant l'Ecole des Loisirs s'oriente plutôt vers la jeunesse, autant Monde sans oiseaux pas du tout.


Monde sans oiseaux laisse entrevoir un roman mais se rapproche finalement plus du conte. Je serais tenté de parler de conte pour adulte mais je vais éviter, la mention "pour adulte" a gtrop souvent recoupé du cul, et on est pas du tout là dessus.
Une fable dans un village coupé du monde se réorganise et tente de reprendre une vie normale malgré les stigmates encore visibles d'un déluge qui a traumatisé le monde. Tout se passe dans un avenir proche traité très différemment post-exotisme d'Antoine Volodine, qui s'attache lui plus à des détails réalistes et noirs. Ici, une réorganisation de la vie dans laquelle s'intègrent des progrès génétiques qui facilitent la vie des éleveurs locaux mais une reconstruction du quotidien qui laisse voir un retour à une vie sociale comme celles dépeintes par Maupassant au siècle dernier. Un petit village qui vit recroquevillé vers le passé mais qui prend les avancées de la science comme si elles tombaient du ciel. Et au milieu de tout ca, un personnage principal dont on suit la vie dans son ensemble, traversée par des personnages secondaires qui se croisent.

Pour un premier roman, ca tient la route. A condition de ne pas s'attendre à un roman. Mais d'en lire un quand même.
En fait, on retrouve pas mal d'éléments de théâtre contemporain dans la manière de présenter les choses et d'intégrer les éléments au roman lui-même. Monde sans oiseaux, c'est une fable qui tire autant son identité de la poésie onirique du théâtre jeunesse que du roman post-apocalyptique.
On y retrouve le déluge de la Bible adapté à l'écriture contemporaine; un huis-clos (ou du moins une unité de lieu) qui arrive du théâtre, une morale tue mais qui prend une place silencieuse, s'exprime comme une petite musique en fond sonore, pas écoutée mais entendue; une opposition assez riche entre le retour à l'archaïque et la volonté farouche d'évoluer, les dérives pas forcément saines ni assumées de ces évolutions.

Il est très riche, ce texte, et l'alliage que Karin Serres a choisi pour construire son conte est finalement assez solide pour supporter les détails qui donne du cachet au texte. Plus encore, cet enchevêtrement d'écriture contemporaine et de ficelles dramatiques plus classiques qui illustre parfaitement cette opposition et lui donne encore plus de force.
Après, effectivement, c'est parfois un peu irrégulier. Quelques détails laissent une impression étrange et paraissent too much, quelques paragraphes sont un peu vite écrit et aurait mérité un coup de plume en plus, mais au delà du théâtre jeunesse, il y a sans doute, chez Karin Serres, une romancière efficace qui se dessine.

L'effet produit est assez étrange et l'impression qu'on a une fois le livre refermé peut laisser circonspect, je vous le concède, mais c'est après que la saveur se déploie. Monde sans oiseaux appartient, en fin de compte, à ce genre de texte dont on ne percoit l'architecture et le goût qu'une fois qu'on en parle, je m'en rends compte en tapant mon article.

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