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La Confrérie des Libraires Extraordinaires
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10 septembre 2012

Le malabar chétif

orcel4Un Zulma. Parce qu'un Zulma, même si on aime par forcément, on trouve toujours quelque chose pour finir émerveillé de ce qu'on a lu. Et puis, sans faire encore l'éloge de Pearson qu'on loue ici a chaque lecture du catalogue de Zulma, il se dégage de la couverture, toujours, ce petit quelque chose qui donne du cachet au bouquin. La couverture sert le texte avant même de savoir à quoi il ressemble. Parce que Zulma, ca sert la littérature.

En l'occurrence, Les immortelles. Je suis totalement infoutu de savoir si j'ai aimé le texte, mais en tout cas, il m'a vachement surpris. Pour planter le décor, il faut s'imaginer Haïti et Port-au-Prince après le séïsme de 2010, et plus particulièrement sa Grand Rue où le tapin est roi. Une rue Saint-Denis dans les Caraïbes apocalyptisées par un rototo terrestre.
Le texte en lui même, à l'exception de quelques phrases qui sautent aux yeux, ne décolle jamais vraiment. On suit une narratrice anonyme qui parle de ses collègues, de ses clients et du quartier. On y retrouve tout un tas de putes qui bossent en camionnette, en bordel ou dans les immeubles, qui se cotoient et se traitent comme des collègues, et la simple description (mais pas physique, attention, les descriptions physiques, c'est vraiment trop chiant) de ce milieu de consoeurs les humanise toutes, elles et d'autres, finalement, et s'attelerait presque à explorer ce qui lie la personne et son boulot, ce ciment si particulier chez elles et dont on ne sait pas s'il s'agit de ciment, de cartilage ou d'élastique. Et puis finalement, point d'exploration. En y pensant une seconde, même si on le regrette au début, se pose la question de savoir s'il n'est pas préférable de laisser le lecteur y réfléchir tout seul avec le matériau de livre Makenzy Orcel.

Mais le plus surprenant, dedans, et le plus créatif, c'est la charpente. Si la plume en elle même est commune, le choix de la construction du récit est en harmonie totale avec le cadre choisi. L'architecture du texte est destroy et étriqué, mais l'est volontairement et dans une maitrise parfaite. Destroy comme peut l'être (j'imagine) le Port-au-Prince depuis cette après-midi d'apocalypse et agrémenté de cette polymorphie sans forme qui doit ressembler au quotidien d'une pute.
La trouvaille créative de Makenzy Orcel, elle est là. Dans ces petites vignettes qui, par leur enchainement, mettent à mal l'intrigue académique (au premier abord) mais se trouve quand même le louer, sourdement, en sous marion (derrière, quand on voit qu'il faut un certain savoir faire pour bâtir ces arcs de cerles, voûtes et ogives qui paraissent défoncées mais qui se trouvent être étudiées pour tout supporter.
Orcel est arrivé ponddre un texte qui parait l'un et est l'autre, qui semble un Tchernobyl littéraire à l'architecture anarchique mais qui s'avère être une Sagrada Familia puissante et modeste.

Je ne sais pas bien si le texte ira loin, de quelle aura il jouira, quelle portée il aura, quel sera son influence sur la littérature ici, là bas ou ailleurs, et je crains qu'il n'en ai pas.
D'où, le boulot du libraire. Si le bon texte est anonyme, c'est qu'il y a quelque chose à faire. Et s'il le reste, c'est que tu as foiré.

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